Bouquets de Juin : le plus beau mois des roses à Marandon.

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Le 2 Juin au matin, il était temps de s’emparer du sécateur.

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Un petit tour rapide dans les massifs au gré de l’inspiration.

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en un tour de main, le bouquet est composé.

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Le jardin est un lieu clos dans lequel le jardinier réunit ce qui lui semble être le meilleur.

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Le bouquet est une mise en scène dans laquelle le jardinier rassemble ce qu’il a de plus beau.

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L’équilibre doit être visuel et chromatique.

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La dominante de la couleur rose est permise par les roses anciennes qui triomphent de façon éphémère à cette époque de l’année.

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Constance Spry, Queens of Bourbons et The Shropshire Lad, Sourire d’Orchidée sont au rendez vous.

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La plus belle cette année est Shropshire Lad (David Austin)  qui déborde ici au centre gauche. Pierre de Ronsard est tombé malade…

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Mais le bouquet rose est rejoint par le bouquet jaune.

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Golden Celebration et Graham Thomas rivalisent avec le Cotinus pourpre.

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Un brin de fenouil bronze apporte de la légèreté à l’ensemble.

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La faiblesse des roses anglaises est de ployer sour leur propre poids.

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Le délice durera quelques jours, le temps d’en recomposer un nouveau et de composter l’ancien…

pivoine Duchesse de Morny

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J’ai retrouvé le nom de la pivoine arbustive présentée en bouquet dans la note précédente. La voici sur pied au Jardin de Marandon

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Il s’agit de : la pivoine arbustive ‘Duchesse de Morny’

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Paeonia suffruticosa ‘Duchesse de Morny’

 

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Elle me vient de mon arrière grand mère, elle a plus d’un siècle,

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elle est passée de l’Ardèche au Forez avant d’arriver à Marandon pour son troisième jardin.

 

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Les autres (j’en possède trois pieds hélas tous identiques) proviennent de deux jardins stéphanois juste avant le passage de la pelleteuse.

 

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Cette pivoine est merveilleuse, d’une rusticité à toute épreuve.

 

 

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Ne vous inquiétez pas si vous voyez émerger les premières feuilles au coeur de l’hiver

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et les premiers bourgeons alors qu’il gèle encore, elle ne craint ni dieu , ni  diable.

 

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Elle apprécit en revanche un sol épais enrichi en fumier ou en compost. C’est après la pluie qu’elle est merveilleuse.

 

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Sur un vieux pied il peut être nécessaire de la rajeunir le floraison sera moindre cette année là,

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mais l’opération vaut le coup pour les années suivantes où elle se rattrape volontiers.

 

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Sa floraison est abondante fin Avril et durant le mois de Mai suivant l’exposition ou l’altitude

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(mes pieds disposés en des endroits différents permettent d’étaler la floraison sur 3 à 4 semaines).

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La plante est intéressante à tous les stades de la floraison et nous livre ici ces dernières splendeurs.

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Jusqu’au dernier moment elle est dévorée par les carabes qui en raffolent sans faire aucun dégât.

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Le feuillage glauque est du bel effet après la pluie.

Alors convaincu par cette merveille ?

 


 

L’arrivée du printemps à Marandon

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C’est parti, ça y est ce coup-ci pas d’erreur, nous sommes bien au printemps.

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Depuis le passage à l’heure d’été, la lumière du soir entre 18 et 19 heures révèle la beauté des premières fleurs.

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D’ailleurs Miou ne s’est pas trompée, c’est ici le meilleur emplacement, à la meilleure heure, elle domine la situation.

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 Le Bleu  des muscaris éclate,

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tandis que le banal pissenlit a le droit de cité dans ce jardin naturel.

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 Les sedums spectabiles forment un coussin réguilier.

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Des gouttes de rosée sont piègées dans les corolles.

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 Le narcisse tranche,

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la pivoine attend son heure de gloire, mais les feuille couleur chocolat ne sont pas sans intérêt.

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Les groseillers à fleurs sont épanouis, l’alliance avec le feuillage est délicat.

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Ce gros bourgeon de pivoine arbustive n’a pas encore rejoint par les fourmis qui y élèveront leurs pucerons.

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La monnaie du pape vient de s’ouvrir aujourd’hui, sa fleur ressemble à celle du geranium, mais le feuillage ne laisse aucun doute.

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 On n’oubie jamais le délicat myosotis.

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Cette feuille est celle d’une sauge, la douceur du feuillage donne envie d’y poser la main.

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Les graminées sortent de leur torpeur,

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 une euphorbe pourpre se déploit nonchalamment.

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 Le carex est lui aussi en fleur

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 Les euchères sont au plus beau de leur feuillage pourpre.

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Le camélia s’ouvre timidement, pourvu qu’il ne gèle pas trop.

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L’arum d’Italie présente un feuillage panaché, 

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les clochettes du pieris japonica se balancent au gré du vent.

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Et la pervenche se prélasse au soleil du soir.

 

Le printemps est arrivé.

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C’est chaque fois la même chose, on désespère,

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on trouve le temps long et l’hiver qui n’en finit plus.

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Le jardin est monochrome sans saveur et sans senteur.

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Les sons sont feutrés : l’hiver est silencieux à moins que le vent ne souffle.

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Et puis tout d’un coup en l’espace de quinze jours tout se réveille et s’emballe,

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la palette chromatique se diversifie,

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ici le pourpre de la pivoine arbustive

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ou celui plus rouge de la pivoine herbacée. Toutes deux nous promettent des moments de floraison intenses et éphémères.

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Des senteurs nouvelles surgissent de la terre qui se réchauffe lentement,

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des sons délicieux nous viennent de nos amis les oiseaux que l’on a nourri tout l’hiver.

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Le printemps est bien là et c’est tant mieux.

En attendant l’été : les roses en fleur.

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Difficile de se motiver pour aller travailler au jardin en ce moment car la terre colle sous les bottes,

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tout est gris, marron ou « verdasse ».

Il faut prendre le bonnet, les gants collent, il fait vite froid et l’humidité persiste.

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Le froid  fait des dégats et il est difficile de voir pointer la vie dans les recoins du jardin.

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Pourtant j’ai attaqué la taille des rosiers et je feuillète mes albums photos pour me motiver.

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En retrouvant celles ci datant d’un mois de Juin je me dis que ça vaut la peine qu’on se décarcasse, c’est en hiver que le jardinier prépare la belle saison.

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En attendant de retrouver des photos de saison avec de la glace et de la neige, je vous propose celles ci histoire de se réchauffer le coeur.

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Bouquet de Novembre

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Alors que le brouillard, la bruine, le froid et l’humidité nous gagnent,

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je vous propose le dernier bouquet de l’année réalisé au début du mois de Novembre avec les dernières fleurs du Jardin de Marandon.

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Les floraisons sont rehaussées de feuillages d’automne, la table est encombrée des derniers achats ou des dernières récoltes de saison.

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Les dernières roses sont les plus vaillantes, on reconnaîtra l’infatigable Pierre de Ronsard et la discrète mais résistante Fairy en dessous. Les sédums spectabile encadrent l’ensemble.

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Les graminées (miscanthus) ont déployé leur plumeau. l’Acer Palmatum Ozakazuki en  a fini avec sa splendide parure écarlate

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Petit détail le vase que j’aimais bien illustré ici a été cassé par le petit chat intrépide dernièrement (voir note précédente).

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Anémone

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Il y a bientôt deux ans, Madame B. m’a donné quelques pieds d’anémones.

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la première année fut un peu décevante car la plante était chétive et peu fleurie,

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Cette année c’est une pure merveille.

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En compagnie de l’érable du japon dont elle profite de l’ombre bénéfique,

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elle donne toute sa splendeur au soir d’automne arrivant.

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Les tons sont délicats, la vivace élégante et peu exigeante refleurira désormais chaque année.

Bouquet de juin à Marandon : le rose l’emporte.

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Non ce n’est pas la vague rose de l’assemblée mais presque,

 

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Aujourd’hui jour d’anniversaire alors les bouquets emplissent la maison.

 

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Le jardin atteint son apogée, les roses anciennes déclinent, les modernes donnent à plein.

 

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Les pluies de la première quinzaine ont cessé et le jardin explose,

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le vert triomphe mais ce sera de courte durée, alors profitons en.

 

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Lumière du matin avant la chaleur de la journée (33 °). (Kifsgate et Bonica à droite)

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Les roses souffrent alors autant les cueillir et composer. (Ici New Dawn)

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Les spirées sont en fleur.

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Moins de senteurs que dans les précedents bouquets mais quelle couleur…

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La suite en musique, patientez et remontez de quelques photos le temps du chargement.

 

 

Bac 2007 sujets de français extraits choisis…

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Voici le sujet des séries littéraires, comme le premier texte parle de jardins, je me suis dit que ça pourrait vous intéresser. Pour certains cela rappellera des souvenirs émus…

Bac de français
Sujets 2007, série littéraire
Objet d’étude : le biographique.

Textes

* Colette, Sido
* Albert Cohen, Le Livre de ma mère
* Simone de Beauvoir, Mémoires d’une jeune fille rangée.
Texte A — Colette, Sido

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digitalis purpurea

Ô géraniums, ô digitales1… Celles-ci fusant des bois-taillis, ceux-là en rampe allumés au long de la terrasse, c’est de votre reflet que ma joue d’enfant reçut un don vermeil. Car « Sido » aimait au jardin le rouge, le rose, les sanguines filles du rosier, de la croix-de-Malte 1, des hortensias et des bâtons-de-Saint-Jacques , et même le coqueret-alkérenge 1, encore qu’elle accusât sa fleur, veinée de rouge sur pulpe rose, de lui rappeler un mou2 de veau frais… À contrecœur elle faisait pacte avec l’Est : « Je m’arrange avec lui », disait-elle. Mais elle demeurait pleine de suspicion et surveillait, entre tous les cardinaux et collatéraux3, ce point glacé, traître, aux jeux meurtriers. Elle lui confiait des bulbes de muguet, quelques bégonias, et des crocus mauves, veilleuses des froids crépuscules.
Hors une corne de terre, hors un bosquet de lauriers-cerises dominés par un junko-biloba1 – je donnais ses feuilles, en forme de raie, à mes camarades d’école, qui les séchaient entre les pages de l’atlas – tout le chaud jardin se nourrissait d’une lumière jaune, à tremblements rouges et violets, mais je ne pourrais dire si ce rouge, ce violet dépendaient, dépendent encore d’un sentimental bonheur ou d’un éblouissement optique. Étés réverbérés par le gravier jaune et chaud, étés presque sans nuits… Car j’aimais tant l’aube, déjà, que ma mère me l’accordait en récompense. J’obtenais qu’elle m’éveillât à trois heures et demie, et je m’en allais, un panier vide à chaque bras, vers des terres maraîchères qui se réfugiaient dans le pli étroit de la rivière, vers les fraises, les cassis et les groseilles barbues.
À trois heures et demie, tout dormait dans un bleu originel, humide et confus, et quand je descendais le chemin de sable, le brouillard retenu par son poids baignait d’abord mes jambes, puis mon petit torse bien fait, atteignait mes lèvres, mes oreilles et mes narines plus sensibles que tout le reste de mon corps… J’allais seule, ce pays mal pensant était sans dangers. C’est sur ce chemin, c’est à cette heure que je prenais conscience de mon prix, d’un état de grâce indicible et de ma connivence avec le premier souffle accouru, le premier oiseau, le soleil encore ovale, déformé par son éclosion…

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Geranium Endresii

Ma mère me laissait partir, après m’avoir nommée « Beauté, Joyau-tout-en-or » ; elle regardait courir et décroître sur la pente son œuvre, – « chef-d’œuvre », disait-elle. J’étais peut-être jolie ; ma mère et mes portraits de ce temps-là ne sont pas toujours d’accord… Je l’étais à cause de mon âge et du lever du jour, à cause des yeux bleus assombris par la verdure, des cheveux blonds qui ne seraient lissés qu’à mon retour, et de ma supériorité d’enfant éveillé sur les autres enfants endormis.
Je revenais à la cloche de la première messe. Mais pas avant d’avoir mangé mon saoul4, pas avant d’avoir, dans les bois, décrit un grand circuit de chien qui chasse seul, et goûté l’eau de deux sources perdues, que je révérais. L’une se haussait hors de la terre par une convulsion cristalline, une sorte de sanglot, et traçait elle-même son lit sableux. Elle se décourageait aussitôt née et replongeait sous la terre. L’autre source, presque invisible, froissait l’herbe comme un serpent, s’étalait secrète au centre d’un pré où des narcisses, fleuris en ronde, attestaient seuls sa présence. La première avait goût de feuille de chêne, la seconde de fer et de tige de jacinthe… Rien qu’à parler d’elles je souhaite que leur saveur m’emplisse la bouche au moment de tout finir, et que j’emporte, avec moi, cette gorgée imaginaire…
Notes
1 Noms de plantes.
2 Mou : viande pour l’alimentation des chats.
3 Cardinaux et collatéraux : les points cardinaux sont les quatre points de l’horizon (nord, sud, est, ouest), les points collatéraux sont situés entre deux points cardinaux et à égale distance de ces derniers.
4 Manger son saoul : manger jusqu’à en être rassasié.

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Texte B — Albert Cohen, Le Livre de ma mère

Ô mon passé, ma petite enfance, ô chambrette, coussins brodés de petits chats rassurants, vertueuses chromos1, conforts et confitures, tisanes, pâtes pectorales2, arnica, papillon du gaz3 dans la cuisine, sirop d’orgeat, antiques dentelles, odeurs, naphtalines4, veilleuses de porcelaine, petits baisers du soir, baisers de Maman qui me disait, après avoir bordé mon lit, que maintenant j’allais faire mon petit voyage dans la lune avec mon ami un écureuil. Ô mon enfance, gelées de coings, bougies roses, journaux illustrés du jeudi, ours en peluche, convalescences chéries, anniversaires, lettres du Nouvel An sur du papier à dentelures, dindes de Noël, fables de La Fontaine idiotement récitées debout sur la table, bonbons à fleurettes, attentes des vacances, cerceaux, diabolos, petites mains sales, genoux écorchés et j’arrachais la croûte toujours trop tôt, balançoires des foires, cirque Alexandre où elle me menait une fois par an et auquel je pensais des mois à l’avance, cahiers neufs de la rentrée, sac d’école en faux léopard, plumiers japonais, plumiers à plusieurs étages, plumes Sergent-Major5, plumes baïonnette de Blanzy-Poure5, goûters de pain et de chocolat, noyaux d’abricots thésaurisés6, boîte à herboriser, billes d’agate7, chansons de Maman, leçons qu’elle me faisait repasser le matin, heures passées à la regarder cuisiner avec importance, enfance, petites paix, petits bonheurs, gâteaux de Maman, sourires de Maman, ô tout ce que je n’aurai plus, ô charmes, ô sons morts du passé, fumées enfouies et dissoutes saisons. Les rives s’éloignent. Ma mort approche.
Notes
1 Chromo : dessin de qualité médiocre.
2 Pâte pectorale : pâte pour soigner la toux.
3 Papillon du gaz : robinet d’arrêt du gaz.
4 Naphtalines : produits antimites.
5 Sergent-Major, Blanzy-Poure : marques de plume.
6 Thésaurisés : amassés, accumulés.
7 Agate : pierre précieuse.

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Texte C — Simone de Beauvoir, Mémoires d’une jeune fille rangée

La principale fonction de Louise et de maman, c’était de me nourrir ; leur tâche n’était pas toujours facile. Par ma bouche, le monde entrait en moi plus intimement que par mes yeux et mes mains. Je ne l’acceptais pas tout entier. La fadeur des crèmes de blé vert, des bouillies d’avoine, des panades1, m’arrachait des larmes ; l’onctuosité des graisses, le mystère gluant des coquillages me révoltaient ; sanglots, cris, vomissements, mes répugnances étaient si obstinées qu’on renonça à les combattre. En revanche, je profitai passionnément du privilège de l’enfance pour qui la beauté, le luxe, le bonheur sont des choses qui se mangent ; devant les confiseries de la rue Vavin, je me pétrifiais, fascinée par l’éclat lumineux des fruits confits, le sourd chatoiement des pâtes de fruits, la floraison bigarrée des bonbons acidulés ; vert, rouge, orange, violet : je convoitais les couleurs elles-mêmes autant que le plaisir qu’elles me promettaient. J’avais souvent la chance que mon admiration s’achevât en jouissance. Maman concassait des pralines dans un mortier, elle mélangeait à une crème jaune la poudre grenue ; le rosé des bonbons se dégradait en nuances exquises : je plongeais ma cuiller dans un coucher de soleil. Les soirs où mes parents recevaient, les glaces du salon multipliaient les feux d’un lustre de cristal, Maman s’asseyait devant le piano à queue, une dame vêtue de tulle jouait du violon et un cousin du violoncelle. Je faisais craquer entre mes dents la carapace d’un fruit déguisé, une bulle de lumière éclatait contre mon palais avec un goût de cassis ou d’ananas : je possédais toutes les couleurs et toutes les flammes, les écharpes de gaze, les diamants, les dentelles ; je possédais toute la fête. Les paradis où coulent le lait et le miel ne m’ont jamais alléchée, mais j’enviais à Dame Tartine sa chambre à coucher en échaudé2 cet univers que nous habitons, s’il était tout entier comestible, quelle prise nous aurions sur lui ! Adulte, j’aurais voulu brouter les amandiers en fleurs, mordre dans les pralines du couchant. Contre le ciel de New York, les enseignes au néon semblaient des friandises géantes et je me suis sentie frustrée.
Notes
1 Panade : bouillie composée de pain, de beurre, d’eau, de lait et de jaune d’œuf.
2 Échaudé : pâtisserie légère passée au four.

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Fantin Latour

I. Après avoir lu tous les textes du corpus, vous répondrez à la question suivante (4 points) :

Montrez ce qui peut justifier le rapprochement de ces trois auteurs, dans leur vision de l’enfance comme dans la démarche qu’ils choisissent pour l’évoquer.

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Rosa Gallica

II. Vous traiterez ensuite, au choix, l’un des sujets suivants (16 points) :

Commentaire

Vous commenterez le texte d’Albert Cohen (texte B).

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Queen of Bourbons

Dissertation

« Les rives s’éloignent. Ma mort approche », écrit Albert Cohen. Selon vous, l’écriture autobiographique est-elle une manière de se préparer à la mort ou de conserver la saveur de la vie ?
Vous répondrez en vous appuyant sur les textes du corpus et sur d’autres œuvres que vous avez lues ou étudiées.

Invention

Gêné ou irrité par le caractère trop intimiste de certaines formes d’écriture de soi, un jeune lecteur écrit une lettre ouverte aux écrivains pour défendre une autre conception de l’autobiographie.