Biennale du Design Saint Etienne. Amsyl le sculpeur , peintre et designer…
Amsyl va à la pêche dans le Niger mais au grand désespoir de ses enfants, il rapporte des cailloux et non des poissons.
Amsyl est un artiste malien qui parcourt les environs de Bamako à la recherche de pierres sculptées par le Fleuve.
Le fleuve Niger en aval de Bamako se resserre et le courant accélère vers les rapides de Sotuba.
Ici sont localisées les « marmites de Sotuba ». Alors que le franchissement du fleuve est parfois périlleux en période de crue, les flots roulent les galets et creusent les marmites de géant dans le grès rouge.
C’est là que Amsyl (Amara Sylla ) a découvert sa plus grosse prise : une roche de 173 kg, sculptée par la nature et par les flots.
L’artiste a sélectionné le rocher, l’a roulé, l’a emporté chez lui dans son atelier.
Cette pierre est magique, le fascine. Elle présente des formes régulières en spirale. Elle porte la marque du temps et de l’eau et le sorcier compteur malien en cesse de raconter ses histoires et comtes magiques sur cet objet si étrange.
Dans un creux de la pierre les galets et la terre enroulés sont encore présents.
Au fond un petit galet a du finir par percer un trou. L’érosion différentielle dans les bancs de grès sculpte la roche par vague et les deux logiques se confrontent : celle de la stratigraphie avec ses bandes parallèles de grès et celle de l’érosion circulaire provoquée par le courant chargé de débris rocheux tourbillonant dans les flots chargés lors des crues.
Pour sa venue à la Biennale Internationale du Design de St Etienne, il emporte avec lui cette pierre-sculpture, mais le commissaire de l’exposition ne souhaite pas que celle ci soit présentée. Amsyl a été retenu pour ses chaises en corne de buffle et non pour ses sculptures de pierre, ses marmites de Sotuba.
Sa série Kabako ne trouve pas sa place dans les salons du Design. Il présente tout au plus une ou deux petites pierres de grès rouge et noir si belles. Celles ci m’avaient intrigué lors de ma première visite à la Biennale 2008.
Kabakourou signifie rocher dominant, caillou dur en pays malinké. En bambara kabako (ou Kabâ Kô) signifie merveille, prodige lorsque c’est un nom et étonnant, extraordinaire lorsque le mot est utilisé comme adjectif.
Lui appelle encore sa sculpture : « l’os de la parole« .
Cette pierre objet d’art reste dans la caisse de l’entrepôt de la biennale à l’abri des regards dans une caisse en bois sous un plastique.
Amsyl me l’a montre un peu déçu de son statut d’objet rejeté. Il espérait tant la montrer et pourquoi pas la vendre comme un objet d’art.
Cette pierre qui a voyagé en avion ne reviendra pas en Afrique. Elle restera à St Etienne à la Cité du Design en attendant qu’un mécène, qu’un musée, qu’un collectionneur ne la retienne et la négocie avec l’artiste qui ne veut fixer un prix.
« Je n’ose pas parler de valeur, je suis dans la recherche d’un transfert de connaissances par rapport à une relation Sud Nord. Au Mali nous sommes pauvres, nous n’avons que 50 ans d’indépendance. Je suis venu apprendre ici, au contact des autres. »
Si quelqu’un est intéressé, cette pierre, cette sculpture cherche preneur.
Contactez le à la Résidence Lubama à Bamako (mail : galeritatoo@yahoo.fr).
Son téléphone en France 0643798552 et au Mali (223)76230527. on peur encore contacter Johanna en France :
johanna_bramble@hotmail.com
Extrait de l’ouvrage Passage (Andy Goldsworthy) .
Je présente à Amsyl le travail d’Andy Goldsworthy « Jardins de pierre » sur le Jewish Memorial de New York , il est fasciné par le travail du sculpteur écossais qu’il découvre. 18 blocs de 3 à 15 tonnes ont été évidés et sont répartis sur une surface de 40 mètres sur 12 sur le toit du nouveau bâtiment du Museum of Jewish heritage. Les rochers évidés sont remplis de terre et des survivants de la Shoah ont planté de jeunes chênes pour créer un jardin des pierres du souvenir.
Le travail d’Amsyl s’apparente à celui d’Andy Goldsworthy mais Amsyl ne connait pas ce sculpteur. La quête d’objets naturels et l’assemblage de ceux ci sous forme de sculpture les rapproche..
Amsyl a travaillé à Bamako pour assembler ses sculptures de pierre, ses galets ou grès érodés assemblés en compagnie de bois dressés.
Né le 7 mars 1951 à Bamako, l’artiste est un ancien photograveur/imprimeur devenu peintre/sculpteur. Pour l’artiste, peindre et sculpter, «c’est exprimer tout le dedans qui fait mal. C’est féconder l’inépuisable fait d’influence, de coïncidence, de collusions et même de plagiat».
Je suis un artiste africain mais surtout un artiste du monde, en ce moment les designers du monde entier sont là et je suis là présent parmi eux.
.«L’imprimerie m’a appris la peinture qui, à son tour, m’a enseigné la sculpture. Mon école est donc ce clin d’œil de la vie», dit-il avec la sagesse du philosophe.
Le Mali fait partie du patrimoine de l’Humanité, quatre régions du Mali sur huit appartiennent au patrimoine de l’humanité.
Je lui ai offert une pierre de St Etienne, un grès houiller noir portant l’empreinte fossilisée de la fougère datant du carbonifère.
En retour il m’offre une de ses sculptures de la série Kabako qui vient rejoindre les autres pierres mémoire au Jardin de Marandon.
« Je fais un échange culturel avec François, nous avons échangé avec nos pierres. On me prend pour un aliéné , un fou. Quand je dis à mes enfants que j’amène une pierre de 173 kg en France ils ne m’ont pas cru et pourtant je l’ai amené ».
Je ne crie pas victoire, mais il y a quelque chose qui commence ».
Il s’adresse alors à Louis un jeune enfant de 6 ans venu avec sa maman « tu vois cette pierre Elle est magique, elle vient d’un lieu magique, plus tard quand tu vas rentrer dans Google tu me verras par l’intermédiaire de la « pierre de Amsyl », la pierre magique.
Amsyl interpelle le passant curieux de découvrir son stand et les enfants sont fascinés par les grandes cornes de zébu. « Allez y touchez, sentez, asseyez vous ici le design se ressent, c’est l’Afrique qui vous rencontre« .
Amsyl fait signer son livre d’or prend ses visiteurs en photo et rapportera chez lui ses souvenirs de rencontre et laisse à St Etienne sa pierre magique dont le destin reste à écrire…